Ji-Young ∆ you were beautiful — now you're just a lie

« Maman tu sais, je crois que cette fois je vais vraiment réussir ! » Et il lui avait adressé un sourire dédicacé — un de ces sourires qui voulaient tout dire. Il y avait tant d’amour, oui; dans ce brin d’esquisse. Tant de hâte, aussi. D’être un grand, d’être ce qu’il rêvait être. Dans quelques mois il passerait pour la deuxième fois le concours; et il en était persuadé, oui : qu’il n’y aurait pas de troisième fois.

Il n’avait pas vraiment compris ce qui s’était passé, avait juste entendu quelques cris. Ses yeux s’étaient ouverts grands; et bousculé il avait fini à terre. « Tu te souviens ? Quand j’étais petit et que tu venais me voir le soir; t’asseyait à coté de moi ? Je mettais ma tête sur tes genoux, et tu passais ta main dans mes cheveux jusqu’à ce que je m’endorme ? Aussi il ne faut pas pleurer maman. Tu le sais bien, non ? Que je suis innocent. » Et il avait envie de pleurer. Mais il devait rester fort, même si il ne pouvait pas prendre la main de ce bout de femme qui s’écroulait devant lui. Car il y avait cette putain de vitre devant eux. Ce putain de mur invisible — cette connasse de sentence qui menaçait de lui tomber dessus à chaque instant.


Qu’avait-il bien pu faire pour vivre cet enfer ?

Il se souvenait juste du J-24; et du J-27 pour son anniversaire. Il se souvenait de cette date censée déterminer sa vie, et de cette autre où il remercierait sa mère de la lui avoir offert, oui. Cette vie. Il avait même préparé un cadeau, et s’était senti si fier. Si fier à l’idée d’offrir quelque chose pour son anniversaire. Il avait ri, lorsqu’il avait imaginé la réaction qu’elle lui ferait.

Il se souvenait de l’avoir eu, d’ailleurs; ce concours. Il se souvenait de tout — il s’en souvenait si bien. Il s’était levé de sa chaise et avait hurlé. Les serveurs l’avaient regardé avec perplexité alors que se ruant dehors; il avait balancé ses feuilles en l’air « JE L’AVAIS DIT ! »
On était venu le chercher deux jours plus tard — il n’avait pas compris.

On lui avait dit qu’il avait tué des gens. On lui avait dit qu’il était un monstre, qu’il ne méritait rien. Qu’il pouvait cependant parler comme se taire — ce en attendant l’arrivée de son avocat.

Il avait voulu crier, leur dire qu’il était la justice. Il avait voulu pleurer; aussi. Taper du pied, leur dire qu’il était innocent.
Mais qui l’aurait écouté ?

A quoi se résumait sa vie, au final ? Un père dont il ne se souvenait rien; une mère l’ayant nourri, éduqué et épaulé. Une mère étant son monde, on mère dont il devait tout — qu’il ne pourrait jamais assez remercier. Des années à l’école se déroulant sans heurt, des amis se succédant, défilant. Certains restant — dont le meilleur, d’ailleurs. San-Woo et son prénom bizarre, et ses moues inoubliables, et ses accolades. Que pouvait-il bien faire, à présent ? S’en sortait-il avec ses études de médecine ? Lui qui avait toujours tant de mal à rester là sans rien faire, qui s’énervait pour un rien. Lui qui l’écoutait toujours parler de tout, de rien. De la vie et de ses contours hésitants.

Avait-il vraiment vécu ? Avait-il apprécié chaque instant ? Avait-il vécu comme si il n’y aurait pas de lendemain ? Il n’en était pas certain. Était juste resté dans sa sphère, dans ses rêves — dans sa réalité. Avait aimé son bout de famille, avait aimé ses amis — la vie, les gens. Il avait voyagé aussi, quoique pas vraiment. Juste en Corée — mais c’était pas plus mal. Même si sa mère aurait pu lui payer plus grand.

Et il ne savait plus trop, non. Ce qui se passait, qui il était.
On lui répétait qu’il était numéro, qu’il était tout sauf ce qu’on aurait pu penser de lui. On lui disait qu’il n’était pas un tueur, mais un voleur. Il était une bombe ayant explosé, une folie ayant dépassé les limites. On lui disait qu’il avait torturé, on lui susurrait qu’il devait avouer. Que de toute manière, on l’avait profilé.

Il avait demandé où étaient les preuves. Il avait demandé à savoir, mais son avocat n’avait rien dit. Et l’impuissance c’était abattue sur lui. Car il commençait à comprendre ce qui lui arrivait, mais cela le dépassait. Car… Ce genre d’injustes situations n’arrivaient-elles pas que dans les romans ? Que dans les séries, les films ? Était-il en train de rêver ? Quelque chose n’allait-il donc pas avec sa mémoire ? Sa conscience ?

Il allait être juriste, bon sang ! Ou même procureur ! Il allait être droiture et honneur. Alors pourquoi était-il assis derrière ce bout de table, à voir son destin lui échapper ? Pourquoi, oui; pourquoi était-ce ainsi ? Pourquoi sa mère continuait-elle de pleurer ? Pourquoi San-Woo n’était-il pas là; pourquoi n’y avait-il que lui ? Que lui et les larmes de sa mère, et les regards haineux ? Que lui et cet avocat en carton; que ce procès bidon ? Pourquoi était-ce ce foyer qui avait du subir de telles atrocités ? Et pourquoi n’était-il pas là, bon-sang ! Qu’était-il comme meilleur ami, oui; pour ne pas se montrer ? Il savait qu’il n’aurait jamais pu faire cela, n’est-ce pas ? Il n’aurait jamais pu faire de mal à quiconque, aidait même les personnes âgées à traverser ! Alors de la à toucher à ses parents… Il aurait dû être de l’autre côté — il aurait du être celui défendant, non celui subissant.

Pourquoi devait-il partir ? Tout laisser ? Serait-il libéré après ? Alors il attendrait; oui. Il attendrait trois ans si il le fallait. Car personne ne l’écoutait, car tout était passé si vite; trop vite. Car il avait soudainement réalisé son inconscience, son ignorance — car il ne savait plus, non.

Qui il était.
pardon